PETIT HISTORIQUE DU COURS DUPANLOUP

 
 

 

I. L’Institution scolaire Dupanloup

C’est une « vieille dame », sans rides... Aujourd'hui ses nombreux enfants - 1600 filles et garçons - peuplent l'Ecole et le Collège.

On peut aussi comparer Dupanloup à un arbre qui, tel le platane ou le marronnier, prend, au cours des années, de la hauteur, de l'ampleur et peut abriter de plus en plus de monde. >

Ce vieil arbre, comment est-il né ?

En 1904, la loi du 17 juillet dissout les congrégations enseignantes et interdit l'enseignement à tous les religieux et religieuses. Fondées au XVIIème siècle par Nicolas Barré, les Soeurs de l'Enfant Jésus ont des écoles à Paris et depuis 1830, au 12 rue de l'Abbé Grégoire (autrefois rue Saint-Maur), un pensionnat de filles. C'est le pensionnat JUMILHAC du nom du propriétaire à qui ont été achetés l'hôtel et son jardin. Or, le 12 septembre 1904, écoles et pensionnats doivent fermer leurs portes.

Que peuvent faire les religieuses enseignantes ? Certaines s'expatrient attendant « des jours meilleurs ». D'autres, comme les Soeurs de l'Enfant-Jésus, se sécularisent, véritable geste d'audace à cette époque : les soeurs reprennent donc un habit civil et leur nom civil. Elles veulent continuer leur devoir et leur mission d'éducation. À la suite de leur fondateur, elles ont la passion des jeunes et croient à l'importance de l'école :

« Le manque d'instruction et d'éducation est la racine de tous les maux que l'on voit dans la société et l'Eglise ».

« Instruire et éduquer est bien plus que de construire des cathédrales, c'est bâtir pour Dieu des temples vivants ».

II n'est pas question de capituler pour la soeur directrice du pensionnat Jumilhac. SOEUR SAINTE CELINE Demaizière, c'est son nom, devient MADAME DEMAIZIERE. Avec 3 autres soeurs (dont « Mademoiselle Clotilde »), dans le même quartier, elle ouvre un pensionnat qu'elle baptise COURS DUPANLOUP.

C'est d'abord un rez-de-chaussée, rue Duguay-Trouin, dont les 5 pièces se voient successivement transformées en classes, réfectoires, dortoirs... et deviennent trop petites. Puis les 150 élèves entrent dans un immeuble libre au 33 rue d'Assas ; le jardin du Luxembourg devient leur cour de récréation ; la chapelle de l'Institut Catholique leur chapelle. Voici qu'en 1912 un grand couvent, rue de l'Assomption (dans le 16ème) se trouve inoccupé, les religieuses s'étant exilées. En y installant ses 250 élèves, Madame Demaizière évite la spoliation de leur bâtiment.

Pourquoi avoir choisi le parrainage de Mgr Dupanloup ?

Les années auparavant, Madame Demaizière avait lu, et avec intérêt, les oeuvres de Monseigneur Dupanloup (1802-1878). Dans ce prélat, évêque d'Orléans, et cet homme politique, libéral et patriote, elle admire surtout le catéchiste renommé et le pédagogue qui réclamait une vraie culture pour la femme. Il a écrit : « Il est évident que l'étude lui est utile, nécessaire même, pour l'accomplissement de ses importants devoirs ». Et aussi « L'éducation est une oeuvre de force, il n’en est pas qui demande plus de courage, de patience et d'amour ».

Encore des transplantations
La guerre 1914-1918

L’arbre continue à s'agrandir et doit se déplacer encore.
Pendant la première guerre mondiale, les événements de 1916 et les bombardements de la « grosse Bertha » effraient les familles et obligent une partie des élèves et des maîtresses à quitter la capitale devenue trop dangereuse. La ville de Lourdes les accueille et les marque d'une dévotion spéciale à Notre Dame, la Vierge fidèle.

À la rentrée de 1918, Madame Demaizière trouve la maison de l'Assomption réquisitionnée par les Américains, 600 élèves sont pourtant inscrites. Pendant quelques semaines, le Cours vit un nouvel exode... avenue Mozart, rue du docteur Blanche, rue de l'Yvette, (rue Pierre Ducreux)... La rentrée ne se fait qu'en novembre rue de l'Assomption, puis celles de 1919 et de 1920. Mais en 1921, les soeurs de l'Assomption sont de retour d'exil.

Boulogne

C’est alors que le COURS DUPANLOUP S'INSTALLE... à BOULOGNE, dans son site actuel.
Un bâtiment y est en vente : le palais du Grand Duc Paul, oncle du dernier tsar de Russie ; la princesse Paley et leurs deux enfants y vécurent quelque temps. Des parents d'élèves, réunis en association, l'achètent ainsi que le parc et quelques « villas » alentour : ils désirent voir s'implanter là une institution chrétienne.
Madame Demaizière a l'intuition que c'est le lieu enfin trouvé pour son « cher Cours ».
Au milieu de tout cet ensemble, avant que d'autres travaux ne commencent, le 1er juillet 1921, elle fit ériger une grande croix puis édifier une chapelle, dédiée au Christ - Roi, chapelle provisoire, pense-t-elle ... que beaucoup ont pu connaître. Elle a été debout 50 ans !
Dans les années qui suivent, le « palais » est complété par un bâtiment de plusieurs étages : c'est la partie « palais neuf » - qui ne fait qu'un avec l'ancien. La « villa blanche » est agrandie de 3 salles superposées.
Aidée d'une équipe généreuse de parents d'élèves et entourée d'un solide corps professoral, Mme Demaizière a pu faire le Cours Dupanloup, lui donner une âme, un esprit de famille, prodiguer une instruction sérieuse, longtemps stimulée par des décorations (blason et fourragère), et une éducation chrétienne solide. Une petite revue mensuelle est un lien entre tous, « Echos et souvenirs » puis « Feuille de platane ».

Qui était Madame Demaizière ?

Née à Louhans, elle a été l'élève des Soeurs de l'Enfant-Jésus à Liesse pendant 10 ans. Elle entre dans la congrégation, à Paris, dans sa vingtième année. Elle était petite de stature mais « sa majesté naturelle la faisait paraître grande et supérieure », disent ses anciennes, et elle inspirait crainte et... affection.
Très douée de dons de mémoire, d'intelligence, d'esprit d'invention et d'organisation, ce fut une femme entreprenante, « d'une inlassable activité », jamais vaincue par les difficultés. Femme de tête, elle était aussi femme de coeur, reconnaissante vis-à-vis de ses soeurs collaboratrices, des laïcs qui l'aidaient, compatissante aux souffrances des uns et des autres. Elle aimait les jeunes pour qui elle voulait la meilleure éducation humaine et chrétienne...

Elle signait ses lettres « votre vieille amie ».

C'était aussi une femme de très grande foi, qui avait une confiance absolue en la Providence de Dieu, source de son audace, de son esprit positif. À la suite du fondateur de sa congrégation, elle avait conscience de l'excellence de sa tâche d'éducatrice et de la passion qu'elle exige. Ses devises étaient « vivre tout en beauté et en bonté », « bon courage et gai visage ».

En 1934, après 30 ans de direction, elle annonce son départ du Cours, non sans émotion de part et d'autre, quoiqu'elle se « sente encore vaillante et ne connaisse pas la peur du travail » écrit-elle... Elle décède trois ans plus tard, à Paris, dans son premier lieu de mission, à Jumilhac qui accueille alors les soeurs aînées.

L'arbre a des racines profondes.
Il ne peut que se développer.

Un élan est donné que rien n'arrêtera ; pas la nouvelle guerre mondiale qui occasionne de nouveaux exodes. En Bretagne d'abord - les anciennes ne peuvent oublier l'année 1940 au château de la Pervenchère ; Dupanloup est alors une annexe de la Croix Rouge, 800 aviateurs allemands y sont installés. Puis à Paris en 1943, au 8 rue de l'Abbé Grégoire (près de Jumilhac) : à cause du danger, le maire de Boulogne interdit, cette année là, toute ouverture d'école dans sa ville.

L'arbre se déploie. Le Cours connaît aménagements et changements nécessaires pour rester toujours en phase avec la société et l'Eglise.

Création et années florissantes d'une école ménagère qui n'a plus sa raison d'être ; construction d'une grande salle de sports remplacée depuis par une plus grande et plus polyvalente construction d'un bâtiment fonctionnel pour les classes primaires (qui fait disparaître des « villas ») ; « conversion » des chambres des pensionnaires en salles spécialisées ; remplacement de la chapelle provisoire par un oratoire moderne ; installation de laboratoires, bibliothèque, centre de documentation, salles d'informatique...
Pour une éducation humaine complète... tout est à l'honneur... les lettres et les sciences : - pour maintenir des sections scientifiques en Terminale, Dupanloup et Notre-Dame ont connu une première classe mixte en 1968 - les arts,dessin, musique... que de camps chantants ! chorales, orchestres...

Quant au sport, il a vu et voit briller de nombreuses équipes et élèves ; le nombre de coupes gagnées est impressionnant !
À l'occasion des classes de découverte, des séjours linguistiques, du théâtre et des fêtes, l'aide et la participation des parents sont bien appréciées.
L'élève est stimulé par des professeurs attentifs à ce qu'il donne le meilleur de lui-même surtout dans ce qui fait son « génie », le mot est de Nicolas Barré qui précisait « on ne cherche pas des cerises sur un prunier ».

N'oublions pas l'apprentissage du partage, de la solidarité avec des personnes ou des pays moins favorisés, de l'accueil de la différence, ni la formation de l'enfant de Dieu : une équipe de catéchistes adapte la catéchèse aux différents âges, prépare et accompagne retraites et célébrations.

La vie n'est pas « un long fleuve tranquille »... Tout corps évolue.

Septuagénaire, le cours vit deux grandes mutations

En 1978, d'école - collège - lycée de filles, le Cours devient école - collège mixte.

Les 3 établissements secondaires catholiques de Boulogne, en accord avec le diocèse, opèrent une audacieuse restructuration. Ils veulent continuer à répondre au mieux aux besoins des familles de l'Ouest parisien qui choisissent l'enseignement catholique. Il s'agit de maintenir des sections au nombre d'élèves trop restreint et d'en créer de nouvelles, indispensables pour aujourd'hui et demain.

Les 2 établissements de filles reçoivent filles et garçons en école et collège ; l'établissement de garçons, Notre-Dame, reçoit filles et garçons en lycée...

En 1994, des classes de ce lycée sont implantées sur le site de Dupanloup, origine d'une dernière et belle construction de classes et d'un nouveau self-restaurant, spacieux et gai.
Depuis 1980 en primaire, 1982 pour le secondaire, la direction est laïque.

Les Soeurs de l'Enfant Jésus, nombreuses au Cours pendant longtemps, étaient présentes partout : direction, enseignement, services..., en partenariat avec des laïcs souvent.

Peu à peu, leur nombre diminue. Petit à petit, les responsabilités sont confiées à des laïcs : gestion, classe, division, catéchèse, direction...

En 1980‒1982, les soeurs confièrent la direction à des laïcs : pour l’école en 1980 avec la nomination de Mme Fauquet assistée par soeur Marie‒Pascale ; pour le collège en 1982 avec M. Trévinal qui remplaça soeur Stanislas. En 1992 fut créée la "Communauté Scolaire Saint‒Jean‒Baptiste de Boulogne" regroupant Dupanloup, Notre‒Dame, Saint‒Joseph du Parchamp, Saint‒Alexandre et Saint‒François d’Assise. Les soeurs laissèrent, en 2000, la tutelle de l’établissement à l’évêché de Nanterre. La direction actuelle est assurée par M. Grimaud (Ecole) et M. Mant (Collège).

Aujourd’hui

Un vieil arbre ne donne pas de vieux fruits : Dupanloup s'ouvre toujours aux besoins du temps : il est établissement d'accueil pour l'Institut Supérieur de Pédagogie où se forment les professeurs de l’enseignement catholique : il en reçoit des stagiaires. Dupanloup accueille des jeunes qui connaissent un handicap.

Certes, depuis 1904, bien des réalités ont changé, les conditions de vie, le nombre d'élèves, les modes vestimentaires, les méthodes d'enseignement. Les échanges, les séjours linguistiques, on parle de « classes transplantées » de plusieurs semaines en pays étranger, la place de l'informatique dans les apprentissages… la participation, le rôle des parents réunis en associations ont transformé notre métier...

Chaque année apporte son lot de constructions nouvelles, de rénovations, d’améliorations des conditions de vie de l’établissement.

Depuis la rentrée de 1998, Dupanloup est sous la tutelle directe de l'évêque du diocèse.
Le directeur diocésain de l'Enseignement Catholique qu'il nomme est, avec lui, garant du caractère chrétien et évangélique de l'établissement.
Si bien des réalités ont changé, les exigences, quant à elles, restent les mêmes, inscrites dans le projet éducatif... ou la tradition : travail, sens de l'effort, respect, honnêteté, simplicité, amitié, souci des autres...

Il faut parfois attendre d'être « ancienne » ou « ancien », voire jeune parent, pour prendre conscience qu'ellesétaient bien nécessaires, ces exigences, pour que le fruit arrive à maturité : un être libre et responsable, un chrétien heureux, une chrétienne heureuse, et missionnaire, dont la société et l'Eglise ont besoin.

Exigences qu'accompagnent, chez les éducateurs, la foi au grandir toujours possible de chacun, l'espérance en l'avenir.

II. LES BATIMENTS

Le Grand Duc Paul Alexandrovitch de Russie était l'oncle du Tsar Nicolas II. Il loua en 1903, puis acheta en 1906 l'ancien palais (devenu le bâtiment principal du Cours Dupanloup), qui avait été la demeure de la princesse Zénaïde (née Narychkine, épouse de Boris Youssoupov, chambellan du tsar) ; ce merveilleux bâtiment avait été construit vers 1863 pour la princesse Zénaïde (l’architecte est inconnu) et est mentionné dans les Mémoires de son arrière‒petit‒fils le prince Félix Youssoupov (celui qui tua Raspoutine), qui y séjourna enfant avant d’habiter plus tard rue Gutenberg ; le Grand Duc Paul y ajouta en 1906 une magnifique rotonde (architecte Bersia‒Tourette) et un jardin d’hiver, formant un ensemble remarquable qui est référencé par la ville.

Par la suite, en 1921, la Société constituée pour gérer la Princesse Paley, l'ensemble de sa propriété de Boulogne, le palais et ses dépendances, et le grand jardin, alors dans tout son éclat, qui les entourait. Le Cours Dupanloup s’y installa, tout en gardant dans certaines salles le décor de l’époque des princes russes.

En 1910, le Grand Duc Paul acheta trois villas, la Villa Blanche, la Villa Rouge et la Villa Gutenberg (disparue), aux 1, 2 et 3 boulevard d'Auteuil, pour le prix de 375 000 francs. La Villa Blanche avait été construite avant 1869 par Edmond de Joly, architecte et propriétaire du terrain. La Villa Rouge appartenait aux Bouwens van der Boyen, une famille de peintres et d’architectes.

De 1948 à 1949, la Villa Blanche fut agrandie afin de mieux loger l'école ménagère qu'elle abritait depuis 1935. Elle abritait aussi les classes terminales et les secondes. Une reconstruction complète de la Villa Blanche a été entreprise de 2014 à 2016 ; ce chantier de 840 m2 comprend 8 classes (dont 6 classes de 3ème), 4 bureaux et l'aumonerie du collège ; le bâtiment, dont seuls les murs de façade ont été conservés, est conforme aux nouvelles normes de sécurité et accessible aux handicapés.

L’annexe du lycée, adjacente à la Villa Rouge, fut construite en 1995.

A partir de 1921, le Cours Dupanloup acheta plusieurs villas le long de la rue Gutenberg, notamment la Villa des Violettes (avec ses deux tourelles d’escalier), la Villa des Buissonnets (classes maternelles actuelles), la Villa des Abeilles et la Villa Saint‒Michel (toutes deux disparues) ; c’est là que fut entrepris en 1968 la construction du bâtiment du primaire. La Villa des Violettes appartenait en 1865 à Louise Darcet, veuve du sculpteur Pradier ; ses dépendances servirent plus tard d’atelier au peintre Théodore Gudin, ami de la princesse Zénaïde, puis aux sculpteurs Auguste Bartholdi et Paul Troubetzkoy. La Villa Saint‒Michel avait été achetée par le peintre espagnol Daniel Vierge, qui y mourut.

En 1970, une nouvelle chapelle fut construite. La vaste chapelle des soeurs avait été détruite en 1969 car en mauvais état ; elle était ornée de fresques de Marcel Caud et son orgue, sur lequel avait joué Renée Nizan, fut démonté.

En 2003 on éleva un nouveau préau, avec une magnifique charpente en bois, et on restaura les boiseries du Grand Salon (devenu CDI depuis 1978). En 2012 le très beau plafond du bureau du directeur du collège a été également mis en valeur.

Un livre retraçant de façon précise l’histoire du Cours Dupanloup et de ses bâtiments entre 1904 et 2004 a été écrit en 2005 par Patrice Assouad. Les notes ci‒dessus en proviennent.

 


 
 
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